20 février 2015

Défi jour 8

La maison qui rend fou

Vous connaissez les Douze Travaux d’Astérix? L’épreuve de la maison qui rend fou? Ben il se trouve que de récupérer le laissez-passer A38, c’est RIEN par rapport à tenter d’obtenir ses résultats de cytologie pour savoir si on a le CANCER.

Notre système de la santé, c’est la maison qui rend fou version ULTIMUM.

Voici ma saga :

Fin 2014, le téléphone sonne :

Secrétaire de la clinique médicale : « Madame, le docteur veut vous rencontrer la semaine prochaine pour vous expliquer les résultats d’analyse. »

À moi-même : « OMG, j’ai le cancer. Qu’est-ce qui peut être anormal dont? À moins que j’aie le diabète? Ah non c’est sûrement le cancer. »

J’accepte le rendez-vous donné même si c’est à mon ancienne clinique à deux heures de chez nous et même si mon médecin de famille n’y est plus depuis un an. Je vais donc revoir le médecin que j’avais vu au sans rendez-vous pour le renouvellement de mes ordonnances et qui avait demandé les analyses.

Je passe une mauvaise semaine à me demander c’est quoi mon problème de santé. Mon amie Sophie endure mon chialage CONSTANT.

Une semaine plus tard, après avoir attendu au moins mille ans dans la salle d’attente, le médecin finit par me recevoir dans son bureau :

Le médecin : « Bonjour, tous vos résultats sont beaux. Glycémie, beau. Cholestérol, wow super beau. Blablabla, toute beau. Mais il y a juste ce petit résultat là d’anormal. On va refaire le test d’un coup que c’est un faux positif. Et aussi une analyse cytologique tant qu’à faire. D’un coup que c’est le cancer. »

Moi : « Le cancer!??? »

Le médecin : « Vous savez, vous avez quarante ans. Vous êtes à risque de cancer maintenant. »

Choc! En un an, j’ai passé de « ah… vous êtes trop jeune pour être à risque de ceci et cela » à « madame vous êtes à l’âge du CANCER ».

Après le temps des fêtes, je vais refaire les prélèvements requis au CLSC, qui eux envoient les échantillons dans un labo quelque part. Je passe quasiment tout l’avant-midi au CLSC, parce que ça semble plutôt chaotique ce matin-là. Et aussi, à un moment donné, c’est la pause.


Deux semaines passent sans que je reçoive d’appel. Je me dis que fiou, j’ai sûrement rien. Mais non. Deux jours plus tard, le téléphone sonne :

Secrétaire de la clinique médicale : « Madame, le docteur veut vous rencontrer la semaine prochaine pour vous expliquer les résultats d’analyse. » 

À moi-même : « Holly shit, là c’est sûr que ma cytologie est revenue positive. Ça y est, j’ai le cancer. »

Je suis contrariée, car je vais encore perdre 6 heures de journée de travail (et quand on est pigiste, c’est CATASTROPHIQUE). Mais bon. J’ai perdu mon médecin de famille. Je suis incapable d’en trouver un dans ma région. Et comme ce médecin a déjà mon dossier, aussi bien de continuer avec lui pour le moment.

Je passe une mauvaise semaine à me demander c’est quoi mon problème de santé. Mon amie Sophie endure mon chialage CONSTANT. Je commence déjà à me demander comment elle fait pour être encore mon amie.

Une semaine plus tard, après avoir attendu au moins mille ans dans la salle d’attente, le médecin finit par me recevoir dans son bureau ET IL ME REDIT EXACTEMENT LA MÊME CHOSE QUE LA DERNIÈRE FOIS :

Médecin : « Bonjour, tous vos résultats sont beaux. Glycémie, beau. Cholestérol, wow super beau. Blablabla, toute beau. Mais il y a juste ce petit résultat là d’anormal. On va refaire le test d’un coup que c’est un faux positif. Et aussi une analyse cytologique tant qu’à faire.

Moi : … (silence éberlué)

Moi : « Mais… On l’a déjà fait la cytologie. Je viens vous voir pour avoir les résultats, vous ne les avez pas? »

Médecin (mal à l’aise) : « Ah non. Je ne les ai pas. Je vais regarder dans mon ordinateur. Eh non. Les résultats de cytologie ne sont pas entrés encore. Ah! Mais je vois que l’autre test que vous avez passé est encore positif. Même chose que la dernière fois. »

Moi : « Ah! Ça commence à être inquiétant alors… »

Médecin : « Ça va être très important qu’on ait vos résultats de cytologie madame, parce que ça se peut que vous ayez le cancer. »

Dans ma tête : « I KNOW!!! Je suis venue pour connaître les résultats et vous ne les avez pas! »
Je retourne chez nous, dépitée d’avoir perdu ma journée pour absolument rien. Et inquiète.

Le lendemain, j’appelle au CLSC pour savoir où sont mes résultats de cytologie. Ils me donnent le numéro de l’hôpital où appeler. On me transfert aux prélèvements. Puis à la cytologie :

Moi : « Bonjour, j’ai passé une cytologie il y a trois semaines et le médecin n’a pas reçu les résultats. Les avez-vous? »

La madame : « Attendez… Je regarde ça. Ah oui! Les résultats sont prêts depuis un bout de temps!

Moi : « Mon médecin ne les a pas reçus ».

La madame : « Ah c’est que le numéro de fax n’était pas écrit sur la demande transmise par le CLSC et nous avons oublié d’envoyer vos résultats. »

Je lui donne le numéro de fax de la clinique.

La madame : « Je suis désolée du retard. Je faxe vos résultats immédiatement. Appelez à la clinique pour vous assurer qu’ils les ont bien reçus. C’est important. »

Moi : « Pouvez-vous m’envoyer les résultats à moi aussi? »

La madame : « Bien sûr que non madame. On ne donne pas les résultats aux patients voyons! »

Moi : « Les fois où j’ai fait faire des prélèvements au privé, on m’envoyait toujours les résultats par courriel en 48 h. »

La madame : « C’est pas le privé ici madame! »

Moi : « Si je me présente à l’hôpital, est-ce que je peux obtenir mes résultats, si je signe un consentement? »

La madame (réticente) : « Oui, vous pouvez. Il faudra vous rendre aux archives. »

Je raccroche et j’appelle à la clinique de mon médecin pour savoir s’ils ont bien reçu le fax. La réceptionniste me confirme que oui. Elle a bien reçu les trois feuilles. Je lui demande si elle peut me les envoyer. Même affaire. « Ben non voyons madame. On n’envoie pas ça aux patients! » Je lui demande quand le médecin me rappellera. Elle me dit qu’elle n’a aucun moyen de savoir ça.

Je décide donc de me rendre à l’hôpital où son mes résultats de cytologie, toute stressée. Je me trouve chanceuse d’avoir certaines connaissances pour pouvoir minimalement interpréter les résultats quand je les aurai enfin en mains!

J’arrive aux archives.

Moi : « Bonjour, je viens chercher mes résultats de cytologie. »

L’archiviste : « D’accord, vous n’avez qu’à signer ce papier. »

Je signe.

L’archiviste : « Merci, vous allez recevoir vos résultats dans une vingtaine de jours. »

Moi : …

Moi : « Pas moyen de les avoir avant? C’est que j’ai hâte de les avoir moi. »

L’archiviste : « Non, il y a 200 dossiers à traiter avant vous. Nous n’avons pas le temps. »

Je ne désespère pas. Je me dis que je vais aller les chercher directement en cytologie mes résultats. Elle les avait devant elle il y a à peine une heure quand je l’ai appelée. Il y a sûrement moyen de faire de quoi.

J’arrive à la cytologie. Et la madame m’envoie promener. « Ben non madame voyons! Les résultats c’est pas pour les patients. C’est juste pour les médecins! » Quand je lui dis qu’au privé, ils nous envoient les résultats directement (ce qui prouve que c’est POSSIBLE), elle me répond : « Si vous êtes pas contente, madame, vous avez juste à aller au privé. »

Je m’en retourne chez nous, penaude. Je passe une fin de semaine dans un état de stress très élevée. Presque incapable de manger. Je me demande qui va s’occuper de mes chiens si je dois être hospitalisée pour mon éventuel cancer. Mon amie Sophie m'endure avec une patience d'ange. Je suis plus hystérique que jamais.

Le lundi matin, j’appelle à la clinique pour savoir quand le médecin va me rappeler. La réceptionniste me dit que mon médecin travaille de soir ce jour-là et que s’il ne me rappelle pas, c’est que mes résultats sont beaux.

Je suis dans un état de stress extrême toute la journée, mais à 22 h, comme je n’ai toujours pas eu d’appel, je commence à être soulagée. J’ai peut-être rien!

Les jours suivants je suis plus détendue. Mais le jeudi matin, un doute m’assaille. Et si les papiers avaient été égarés ou oubliés quelque part? J’appelle donc à la clinique. Encore.

Moi : « Je voudrais juste savoir si le médecin a eu le temps de regarder les résultats de cytologie qui vous ont été faxés vendredi. »

La réceptionniste (avec une voix joyeuse) : « Non, il ne les a pas encore regardé. Il n’a pas eu le temps. »

Moi (atterrée) : « C’est que je suis inquiète. J’attends de savoir si c’est cancéreux mon affaire. Est-ce que vous pouvez lui demander de m’appeler aujourd’hui? »

La réceptionniste : « Je vais lui laisser un message courriel et un message dans son casier. Mais je ne peux vraiment pas vous promettre qu’il va vous appeler aujourd’hui. Il est très occupé. »

Moi : « Je tiens vraiment à ce qu’il m’appelle. »

La réceptionniste : « Bon d’accord, mais ça va vous coûter 25 $. »

Moi : « D’accord ».


Toute la journée du jeudi passe : pas d’appel.

Pas d’appel le vendredi non plus.

Je suis en mode recherche de solutions de rechange. Je fais quelques appels dans des cliniques privées, mais impossible d’avoir un rendez-vous rapidement. Pour ce genre de problème, ils exigent que je fasse un examen complet et le coût me semble exorbitant. De toute façon, pas de rendez-vous avant 10 jours pour un examen complet d’une nouvelle patiente comme moi. Je décide donc d’attendre que le médecin initial me rappelle.

Mais toujours pas d’appel la semaine suivante… Et je constate de nouveaux signes qui m’inquiètent dans mon état.

Je décide donc d’aller au sans rendez-vous dans ma région aujourd’hui. L’infirmière me refait passer le test de base. Toujours le même résultat que les deux premières fois.

La docteure que je rencontre me dit que c’est vraiment la cytologie qui est importante :

La docteure : « Madame, vous savez à votre âge, ça se peut que ce soit le cancer. Ce serait très important que vous demandiez à votre médecin de vous donner les résultats de votre cytologie. »

Moi (dans ma tête) : $/?$/?&$&%?%&?)&?&?$!!!

Moi (explosant un peu en sanglots) : « Oui, mais j’ai tout fait pour les avoir mes résultats! C’est IMPOSSIBLE! C’est comme la maison qui rend fou dans Astérix. EN PIRE! Vous pouvez pas les faire venir de l’hôpital de Valleyfield vous? Peut-être que ça irait plus vite? »

La docteure (impassible devant ma prestation dramatique) : « Signez ici et je vais faire venir vos résultats. Mais je ne sais pas du tout quand je vais les recevoir. Il faudrait que votre médecin de famille qui s’occupe de ça. »

Moi (dans ma tête) : Mais je n’en ai fucking pas de médecin de famille!!! Qui a ça un médecin de famille? Ça n’existe plus, vous devez bien le savoir!

Moi (tout haut) : « Si vous pouvez me rappeler quand vous aurez les résultats ce serait vraiment gentil. »

Je pars. Et je ne sais toujours rien. Mon amie Sophie va devoir endurer mon chialage pendant un bout de temps encore. (My god, merci d'être là, Sophie!)

Je suis vraiment, vraiment fatiguée là.

Mais je pense que notre système de santé public est plus fatigué que moi. Il me semble agonisant.


1 commentaire:

Norm a dit…

Tellement vrai, j'ai vécu la même situation avec mon genou. 6 mois pour avoir un IRM, obtenir les résultats grace à un contatc, aller les porter au médecin. Pis la, un orthopédiste qui ne m'appellera probablement jamais...Pis la on coupe dans la santéeNorm